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Nos actus

Depuis le début de cette année scolaire, le Festival du Cinéma européen se rend plusieurs fois par semaine dans les cours des écoliers de la métropole Lilloise. C’est l’occasion pour eux d’apprendre d’une façon différente. Si le but est avant tout de leur faire passer un bon moment et de les initier au cinéma, ces interventions permettent également de sensibiliser les enfants à diverses thématiques grâce aux courts métrages.

Des élèves de CE2 et CM1 ont ainsi pu redécouvrir les enjeux environnementaux grâce à des courts métrages qui les ont interpellés. A titre d’exemple, l’un des courts métrages critique, par le biais de métaphores bien choisies, le déni écologique. Il s’adresse autant à des enfants par son dessin d’animation et la situation comique dans laquelle se trouvent les personnages qu’à un public averti en raison des messages qu’il porte sur l’urgence climatique et la nécessité d’agir. Ces courts métrages permettent une approche légère d’enjeux importants.

En plus du visionnage de courts métrages, les écoliers participent aussi à des activités amusantes. Ils doivent par exemple dessiner des logos évoquant la protection de l’environnement ou par groupes doubler un passage d’un des courts métrages vus auparavant, ce qui tourne vite aux fous rires lorsqu’ils regardent à leur tour le passage doublé par leurs camarades.

On a hâte de vous partager la suite de nos interventions dans les collèges et lycées !

 

Retour sur la 38ème

Le dimanche 13 novembre, la 38ème a fait son grand retour au cinéma l’Univers autour de thèmes et d’esthétiques variés mêlant l’éveil du sentiment amoureux au désespoir qu’il fait naître, la nécessité d’oublier à celle de se venger. Nous vous proposons un retour sur cette NDC en attendant la prochaine qui se déroulera le dimanche 4 décembre à 20 heures au cinéma l’Univers.

 

Comment se reconstruire face au refus d’être aimé en retour ? Doit-on se sentir responsable de mal aimer l’autre ? Bien aimer c’est aussi refuser de penser sa présence comme nécessaire. Lorsque le langage fait défaut, lorsque les êtres ne se comprennent plus, la violence semble être la seule issue possible.

Fall of the Ibis King  révèle à travers l’histoire conflictuelle de trois protagonistes des coulisses de l’Opéra comment le tragique amoureux naît de celui de mal aimer l’autre. L’incertitude du lien qui les unit devient alors responsable d’une maladresse qui les rend vulnérables, leur fait violence au point d’en devenir meurtrière. D’emblée, les impressions de grincements, les croassements d’oiseaux, les échos de voix égarées saturent l’espace sonore et nous plongent dans un état de confusion. Les traits sont flous, mouvants, les formes, ambiguës, imprécises ; l’histoire des personnages est ainsi telle une esquisse condamnée à l’état de brouillon. Pas toujours évident à suivre, ce court n’en délaisse pas moins une poésie folle héritée d’un graphisme fauviste aux couleurs vives et changeantes. Les mouvements fluides des personnages, l’enchaînement rapide et désordonné des plans semblent s’opposer à la dureté des formes, des regards et à la gravité des contrebasses. Tout tend ainsi à se contredire, du dessin à la musique, créant par là une impression chaotique, symbole de l’échec des personnages à véritablement se comprendre.

Au revoir Jérôme raconte quant à lui l’histoire tragique mais lumineuse de Jérôme qui décide de partir à la recherche de sa dulcinée Maryline. Persuadé de la réciprocité du sentiment amoureux qui le porte, Jérôme part à la conquête des mondes merveilleux que contient le Paradis ; des champs de pâquerettes où poussent des téléphones rampants, aux forêts tropicales où la plus fascinante des créatures prend racine dans un arbre, en passant par un labyrinthe aux formes disparates et une mer de coraux scintillants, Maryline semble pourtant introuvable. Au revoir Jérôme traite ainsi avec audace, finesse et une drôlerie infinie le motif du désespoir amoureux, nous entraînant dans un voyage explosif de couleurs, de formes, de sonorités vers la voie de la reconstruction et de l’oubli.

Mais comment seulement oublier quand le lien qui nous rattache à l’autre est encore vivant ? Comment cesser de l’aimer brusquement quand les circonstances nous l’imposent ? De son vivant, l’être aimé ne fait que nous échapper, mais une fois disparu, il continue de manifester sa présence.

Dans T’es morte Hélène, Maxime semble être tiraillé entre son refus d’oublier celle que la mort lui a ôté si précipitamment et la nécessité d’un tel oubli pour pouvoir vivre à nouveau. Pourtant la figure d’Hélène, incarnation vivante du souvenir qu’il en a, s’impose constamment à lui à travers des lieux où tous deux se sont aimés et des impressions qu’ils ont ensemble partagé, suspendues à l’écho des premières notes de Stand by Me. L’omniprésence d’Hélène devient peu à peu obsédante voire angoissante, conférant au court-métrage une dimension nouvelle dont la terreur et le réalisme frôlent le genre de l’horreur. Le mélange permanent des registres est précisément ce qui rend le film aussi contradictoire et fascinant ; les personnages sont tour à tour charmants, drôles, effrayants et pathétiques. T’es morte Hélène est ainsi un film ambitieux dont la profondeur du scénario et des jeux d’acteurs nous invitent à mener une véritable réflexion sur la mort et l’oubli.

Le censeur de rêve : gagnant du prix du public 

 

Le Censeur de rêves représente avec cette même justesse sur fond de mise en scène hollywoodienne l’incapacité d’une mère à oublier la mort de son fils dont elle se sent profondément coupable au point de s’empêcher d’exister. A la manière de Inception, une équipe de tournage s’infiltre dans sa tête pour organiser ses rêves et tenter de la préserver de possibles cauchemars. Chaque nuit, l’équipe doit cependant affronter la puissance de l’inconscient, capable de faire soudainement ressurgir de lointains traumatismes. Mêlant les codes hérités du drame, de la tragédie et de la comédie, le film joue à la frontière des genres et révèle par là toute la complexité du choix de l’oubli et de la rédemption.

Empli d’une légèreté infinie, Le Voisin de Lou raconte l’histoire de Vladimir, jeune homme de dix-sept ans, secrètement amoureux de sa voisine Lou et prêt à sacrifier son désir pour s’affirmer pleinement comme son ami. Lumineux, drôle et attachant, ce court-métrage montre comment l’appel de l’amour naissant laisse parfois place à l’évidence de l’amitié dans le but de préserver la préciosité d’une relation dont la sincérité et la poésie échappent à l’impératif amoureux. Grâce à un jeu d’acteurs remarquable, l’ambiguïté de leur relation se décèle peu à peu au détour de rires, de regards complices, de jeux d’enfants, saisissant le sourire du spectateur radieux. Et si à trois vous n’êtes toujours pas curieux de le regarder, foncez… Un, deux, trois.

Plus politique, On n’est pas des animaux interroge l’impossibilité du couple comme cadre au sentiment amoureux, écrasé par la prédominance des rapports sociaux hommes/femmes jusque dans la sphère de l’intime. Trois ans après leur rupture, Igor ne parvient à oublier son ancienne petite amie, Marie, dont les revendications féministes exacerbées lui échappent totalement alors qu’elle tend à s’affirmer indépendamment de toute relation. Pourtant en allant de nouveau lui parler pour se persuader que le combat qu’elle mène vise à l’empêcher de passer à autre chose, Igor reproduit précisément ce que Marie dénonce comme une oppression de la femme sur les réseaux sociaux. On n’est pas des animaux traite ainsi avec un humour déconcertant et décalé, parodiant le politiquement correct, de la persistance des stéréotypes hommes /femmes à l’échelle du couple. Si la position de Marie se veut exagérée, reconnaissant dans le moindre comportement de l’homme un excès de violence, la maladresse de Igor, pétrifié à l’idée de dire ce qu’il ne faut pas, crée un décalage propre à la parodie. Le couple, loin de transcender les rôles sociaux de deux êtres amoureux, contribuerait ainsi à les exacerber au point de forcer l’amour à devenir politique et à dissoudre le cadre qui lui était prescrit. La forme stable de l’amour devient dès lors un problème sociologique ; l’usage des réseaux semble forcer Marie à un engagement permanent jusque dans ses relations intimes qui deviennent le lieu d’expression de différences entre les sexes et les genres. Cette institutionnalisation de la sexualité déstructure certes les normes mais décompose le lien, conduisant les deux protagonistes à une impasse.

Dernier court-métrage de cette projection, Notte di Merda se démarque par l’originalité de son scénario pris à rebours et retraçant le meurtre malencontreux d’un homme inconnu dans un appartement qui ne lui appartient pas. Histoire d’une revanche sanguinaire, drame plein de rebondissements et d’incompréhensions, ce film nous plonge dans l’atmosphère lourde et chaotique d’une nuit inoubliable.

Coups de projecteur

 

Dans son dernier long-métrage, véritable électron-libre à mi-chemin entre le documentaire, la fiction, le drame et la comédie, Gad Elmaleh se livre au monde en racontant l’histoire de sa conversion au christianisme. Il aborde avec brio la question religieuse, en s’affranchissant de tous les stéréotypes, tout en s’amusant des clichés portant sur deux communautés religieuses, juives et chrétiennes.

Si le sujet, sensible en apparence, est traité avec tant de naturel, c’est sans doute parce qu’il a été imaginé sans filtre. Gad Elmaleh, plein d’autodérision, se parodie lui-même ainsi que sa famille et ses proches, et parvient ainsi à créer un comique subtil et finement abordé. Plein de doutes, Gad se livre à un exercice d’équilibriste visant à interpeller son public. Ce pari est parfaitement relevé car si le film est aussi intelligent, c’est aussi parce qu’il interroge sur la spiritualité. Une rencontre étincelante entre les sujets religieux et culturels fait émerger de nombreux questionnements chez le spectateur, qui n’en sortira pas inchangé. En bref, Reste un peu est une réalisation soignée et légère au service d’un film qui fait du bien, sans vouloir dicter le bien.

 

Lors du visionnage d’un court métrage, nombreux sont les facteurs qui déterminent si le spectateur a aimé le court ou non. Cette satisfaction ressentie est le résultat de plusieurs minutes de contemplation de l’œuvre, et par conséquent de ce qui attire l’attention du public. Un des aspects les plus important dans les courts métrages et le cinéma en général est la lumière. Douce, crépusculaire, tamisée voire inexistante, la lumière est un élément central du court métrage qui frappe directement la sensibilité du spectateur. Pourquoi et comment la lumière détermine-t-elle ainsi l’effet du court sur le spectateur ?
             
Avant tout, la lumière est rythme et temporalité. Elle permet au spectateur de rendre compte du temps qui passe et de saisir la temporalité de l’action en cours de déroulement. Dans Le Voisin de Lou (Hector Albouker, Victoria Lafaurie, 2021), la lumière accompagne le trajet des deux adolescents à travers la ville. Si elle est forte, blanche et étincelante au début d’après-midi pour marquer le début du périple, elle décline au fil des heures pour devenir douce et évoquer le soleil couchant lorsque Lou arrive à destination. L’après-midi de séduction s’achève sur le départ de la protagoniste, et sur celui de la vive lumière de l’après-midi. La lumière est ainsi synonyme du temps qui passe et, par conséquent, de l’habitude. Chaque jour le soleil se lève, entame un jour nouveau puis scelle la fin de celui-ci dans une irrémédiable répétition. Dans Super Nova (Juliette Saint-Sardos, 2021), le trajet de Sasha est un itinéraire habituel, à l’image des regards qu’elle récolte sur son passage. C’est l’inlassable répétition du quotidien et de sa pénibilité qui sont ici illustrés par la lumière.

Mais la lumière est aussi évocatrice de chaleur. Il est impossible de dissocier les deux, la simple vue de la lumière amène aussitôt l’idée de chaleur. Dans Le Voisin de Lou, la chaleur est synonyme de torpeur. La Lumière est représentative de la chaleur estivale, de la paresse et de l’oisiveté qui accompagnent la journée d’oisiveté estivale des deux jeunes gens. Dans Phosphorus (Keilidh Bradley, Jennifer Belobi et Eduardo Adsuara, 2021) la lumière est incandescence, chaleur et soleil : la lumière et la chaleur ne font qu’un et attirent inévitablement les sens du spectateur. Cette chaleur est l’expression de l’érotisme de Supernova, que Sacha véhicule au travers du dédale des rues de la cité phocéenne, volontairement ou non. La lumière et la chaleur sont les guides de Sacha dans son déambulement nocturne, dans des rues mal éclairées, si ce n’est par les regards lubriques des hommes sur son passage.

Ainsi, la lumière est génératrice de sensations, parfois même d’émotions. L’effet de la lumière sur les spectateurs permet de faire ressortir certaines émotions. La lumière vive et pure d’une après-midi d’été rend compte de l’insouciance, de la jeunesse et des sentiments immodérés de Lou et Vladimir. La lumière déclinante, moins vive, de la fin d’après midi transmet au lecteur la mélancolie d’un amour non déclaré, bien que partagé. Le crépuscule reflète alors les regrets possibles de cette absente déclaration. La fin de la journée marque la fin d’une idylle adolescente. Ainsi, lorsque la lumière diminue les émotions transmises sont moins orientées vers la joie mais davantage vers la mélancolie. La tristesse de Sacha est visible le soir, en l’absence de lumière. Ses larmes ne sont éclairées que par le bout incandescent de sa cigarette. L’absence de lumière fait ici parvenir la peine jusqu’au spectateur. Au contraire, le personnage incandescent de Phosphorus retranscrit la vitalité, la force et la fureur de vivre.

La lumière touche tout le monde. Elle réveille les sens comme les sentiments, évoque en nous la temporalité ou les sensations les plus primaires. Nul besoin d’être cinéphile pour y être sensible, la lumière parle au plus grand nombre. Accueillir la lumière, c’est accueillir les émotions, les intentions et le message d’un court métrage.

Les séries policières

Les séries policières à suspense se sont fait une véritable place dans le monde des séries, elles usent de plus en plus de technologies, d’effets spéciaux ou encore multiplient les saisons afin de rivaliser. Toutefois il existe encore des séries policières simples, portées par des intrigues savamment construites et des acteurs qui sont dans le juste de leurs personnages.

Anatomie d’un scandale
Production Netflix 2022, cette mini-série affiche dès le premier épisode son envie de simplicité : une intrigue unique, un casting brillant bien que réduit, et des lieux récurrents de tournage. James Whitehouse (Rupert Friend), un membre du gouvernement britannique, est accusé de viol par sa maîtresse, membre de son cabinet, et nous suivons de près son procès (Michelle Dockery pour la Couronne) ainsi que sa vie familiale (Sienna Miller en tant que Sophie Whitehouse) pendans les 6 épisodes de la saison 1.
Netflix ne s’est à ce jour pas encore prononcé sur la possibilité d’une saison 2.
Disponible en streaming sur Netflix

Broadchurch
Une petite ville côtière du sud de l’Angleterre, une famille presque modèle et un inspecteur torturé : quoi de mieux pour démarrer un bon policier ? Et en effet, cette série tient toutes ses promesses avec ses 3 saisons qui permettent de dérouler l’intrigue sans la brusquer ni l’essouffler, de chercher au côté des inspecteurs Hardy (David Tennant) et Ellie Miller (Olivia Coleman) qui a tué Danny Latimer. Cette enquête, ainsi que le procès qui suit, tient les habitants de Broadchurch ainsi que les téléspectateurs en haleine.
Cette interprétation a tant fait fureur par sa justesse qu’une version américaine (avec David Tennant dans le rôle principal) a vu le jour, Gracepoint, ainsi qu’une version corse, Malaterra.
Disponible en VOD sur Canal ainsi qu’en streaming sur SALTO.

Squadra Criminale
Peut-être la plus compliquée des trois, Squadra Criminale n’en demeure pas moins efficace. Miriam Leone campe l’implacable capitaine de la brigade criminelle de Turin, Valeria Ferro, qui doit démêler des enquêtes difficiles (par 2 épisodes) tout en faisant le jour sur l’intrigue principale : le meurtre de son père. Pas d’effets spéciaux, pas de strass ni de paillettes, mais bien une Italie brute et brutale qui nous livre sa noirceur au rythme de l’orchestre symphonique national de la Rai.
Disponible en replay sur Arte et en streaming sur Prime Video.